«Pour UBS en France, l'instruction sera longue»

La banque suisse a également a été placée sous statut de témoin assisté pour «blanchiment de démarchage illicite» et «blanchiment de fraude fiscale». Enfin, elle a été placée sous contrôle judiciaire avec un cautionnement de 2,875 millions d'euros (quelque 3,4 millions de francs).
En quelques jours, cette enquête menée depuis plus d'un an suite à des dénonciations d'anciens collaborateurs d'UBS France a pris un autre tour. Avocate fiscaliste et auteur de l'enquête «Exilés fiscaux: tabous, fantasmes et vérités», Manon Sieraczek-Laporte décrypte ce nouvel épisode du conflit fiscal franco-suisse.
Manon Sieraczek-Laporte – C'est la suite logique du processus judiciaire engagé voici de longs mois. Il est reproché à UBS «le démarchage illicite» et le «blanchiment de fraude fiscale». Ce n’est pas sans rappeler l'enquête du journaliste de La Croix, Antoine Peillon, dans son livre «Ces 600 milliards qui manquent à la France». Si ces faits sont avérés, les enquêteurs devront établir de quelle manière il y a eu incitation ou participation au délit de blanchiment de fraude fiscale. C’est à la suite des auditions, confrontations, et autres perquisitions qu’il sera possible de répondre à cette question. Ce d’autant qu’au cours de la procédure d’autres langues se délient. Dans le cadre d'affaires financières, il faut du temps pour démêler tous les fils. L’instruction sera longue à l’instar, même si l'affaire est très différente, de l’Angolagate qui a duré une dizaine d’années.
– Quelles sont les peines encourues par les personnes mises en examen?
– On évoque là des délits pour lesquels les sanctions pénales ont été alourdies, comme le blanchiment de fraude fiscale. Selon la loi française, cela revient à apporter son concours à une opération de placement, de dissimulation ou de conversion du produit direct ou indirect d'un crime ou d'un délit (fraude fiscale). Or, le blanchiment de fraude fiscale est passible de cinq ans d'emprisonnement et de 375'000 euros d'amende (quelque 500'000 francs). On peut observer que la procédure concerne aussi bien des personnes physiques que morales. Certains ont été mis en examen et d’autres bénéficient du statut de témoin assisté. Ce dernier permet au conseil du mis en cause d’avoir accès à tout le dossier pénal.
– Quels impacts peuvent être envisagés à l'avenir?
– Il est difficile de mesurer précisément l'impact. Avec ce que l'on sait, le schéma est assez similaire à ce qui s'est passé aux Etats-Unis. UBS est en première ligne. Tout dépendra de la volonté politique des uns et des autres. Entre la Suisse et la France, les relations sont déjà tendues depuis quelques mois, notamment avec la modification de la convention en matière de successions et le caractère automatique des clauses d'assistance administrative. Là c'est une nouvelle pierre dans le jardin des bonnes relations diplomatiques, même si ce n'est pas la Suisse en général mais une banque qui est impliquée.